LE RÉSEAU N’EST PAS UN INSTRUMENT D’ÉVANGÉLISATION

 

« Le réseau n’est pas un instrument d’évangélisation,

c’est une ambiance pour y habiter »

Interview de la revue « Vida Nueva » au Père Antonio SPADARO, SJ

Prêtre jésuite, blogger, écrivai    n, twitier, professeur, consultant de deux Conseils Pontificaux... Il est encore connu par sa condition de directeur de la Civiltà Cattolica... Mais cependant, l’une des plus grandes contributions de ce studieux est ce que l’on appelle la ciberthéologie, définie par lui-même comme « penser la foi en temps du Réseau ». Sur ce thème, il vient de publier un livre en espagnol et a parlé le 5 avril dernier au cours du « 1er Congrès et Mission », où il a lancé des affirmations qui provoquent la réflexion : « Le réseau n’est pas un instrument ‘évangélisation » ; « c’est inutile de faire des profils de Facebook avec des photos de petits anges » ou « la logique de la chaire ne marche plus ».

Quel est le rôle de l’Église dans le Réseau ?

l’Évangile concerne l’homme actuel, de telle façon que l’Église est appelée à être là où il habite. Aujourd’hui l’homme est aussi dans le réseau et l’Église est donc appelée à habiter ans lr réseau, non pas parce qu’il faut se metre nà jour, mais parce qu’elle doit se rendre présente là où sont les hommes.

Il ne s’agit donc pas d’un instrument d’évangélisation, mais d’une ambiance...

C’est une idée qui émerge maintenant. Il suffit de lire le dernier message du Pape Benoît XVI à l’occasion de la Journée Mondiale des Communications Sociales : l’Église n’utilise plus le mot ‘instrument’, mais ‘ambiance’. Le réseau n’est plus simplement un instrument, c’est une ambiance où nous créons des rapports et nous connaissons. C’est pourquoi, nous sommes aussi appelés à vivre en Internet.

Y a-t-il des résistances dans l’Église ?

Il y en a, car on perçoit Internet comme la radio ou la télévision. J’ai constaté que même chez des évêques il y a d’abord des résistances qui se transforment ensuite en enthousiasme. Promouvoir cette manière de comprendre le réseau est un défi intéressant et passionnant, parce que nous ne parlons pas d’utiliser un instrument ; nous, parlons d’incarner la vie chrétienne dans une nouvelle ambiance.

On peut objecter que l’Église s’expose un peu trop en étant sur le Réseau

L’Église doit être sur le réseau parce que les hommes sont là. Je peux comprendre l’objection : elle s’expose trop, mais il vaut mieux toujours garder une présence à travers laquelle on puisse contrôler l’opinion des autres, que de ne pas l’avoir.

Encore une thèse que vous soutenez est que le Réseau doit susciter des questions plutôt que d’offrir des réponses.

C’est encore un grand défi. Pour le moment, il n’y a que des réponses ; par exemple, la publicité est une réponse à des questions que parfois nous n’avons pas même formulées. Et l’évangélisation a cédé aussi à cette logique, car nous sommes habitués à considérer l’Évangile comme une réponse à toutes les questions des hommes ; une logique qui transforme le message évangélique en une réponse comme tant d’autres. Aujourd’hui, le grand défi est de montrer à l’homme de quelle façon l’Évangile contient les grandes questions qui le concernent. Ceci peut permettre de rencontrer le Christ.

Est-ce qu’il existe le danger de tomber en une espèce de marketing ecclésial ?

C’est un risque. C’est pourquoi j’insiste en ce qu’il ne faut seulement pas donner des réponses, mais aussi susciter des questions. Il faut éviter la logique de la publicité, d’essayer de vendre le meilleur produit.

Même dans le continent digital il y a des exclus, n’est-ce pas ?

Ces derniers temps a grandi la conscience de ce que le Réseau doit être reconnu comme un droit, par exemple, pour accéder à l’information. L’accès à Internet est fondamental et pour cela même on met en marche des projets pour que dans les endroits sans recours l’on puisse compter sur une technologie appropriée. Dans ce sens, je tiens encore à dire qu’il est très important que la communication soit l’écho des besoins des plus pauvres. Ceux qui ont les moyens ont la responsabilité éthique de donner la voix à ceux qui n’en ont pas.

Est-ce que le Pape est un modèle de communication ?

C’est vraiment remarquable qu’une personne de 77 ans et sans expérience technologique, puisse communiquer de manière adéquate avec le monde actuel. De fait, il s’agit d’un Pape facilement twitable et qui a de très bons rapports avec les moyens de communication car il fait que son message parvienne très facilement. Ceci qui est surprenant découle de sa capacité pastorale et de ses rapports avec les gens.

(Source : Revue VN. Nº 2890 – avril 2014)